Premier album du dessinateur et scénariste Jean-Etienne, La Nuit des Lanternes nous plonge au cœur d’un folklore païen évoquant celui des pays nordiques ou de la culture amérindienne. Se déroulant au large des côtes continentales, l’intrigue suit le retour d’Eloane sur son île natale après des années d’absence à l’occasion de la cérémonie des lanternes, rite annuel au cours duquel les insulaires déposent leurs lanternes au pied d’une statue représentant une entité surnaturelle. Ce retour semble également être pour la jeune femme sa dernière chance de rétablir le avec son frère, mutique depuis le tragique incendie ayant emporté son père, et sa mère, avec laquelle elle entretient des relations conflictuelles. Mais les festivités vont virer au cauchemar, arrachant de son sommeil une créature ancestrale rappelant le fameux Wendigo. La belle idée de l’auteur est d’employer ici l’argument du fantastique comme catalyseur aux troubles familiaux. Une idée qu’il assume jusqu’au bout. Certes, le récit qu’il propose au lecteur est sans réelle surprise, mais il se révèle solide et ne souffre d’aucun temps mort. Enfin, son dessin, sous l’influence de l’expressionnisme allemand avec ses contrastes acérés et ses couleurs vives, ajoute du mordant à cette palpitante histoire. Selon moi, Jean-Etienne a livré ici un très beau travail graphique, dont il documente la recherche en fin d’ouvrage, en même temps qu’un touchant drame familial. A réservé toutefois à un public averti.