Tori et Lokita laissait entrevoir quelques dérives dans le cinéma des Dardenne, Jeunes Mères confirme bien qu'ils ont perdu le nord.
Jeunes mères est un film choral où l'on suit le parcours de 5 jeunes mères adolescentes hébergées dans un centre maternel. Jessica n'a pas encore accouché et souhaite trouver sa mère qui l'a aussi "abandonné". Perla souhaite créer une vraie vie de famille avec son copain, trouver un appartement, tout en faisant face à d'anciens problèmes d'alcool. Julie lutte contre son addiction, ses troubles et tente aussi d'avoir une vie normale avec son copain (seul père véritablement présent). Ariane vient d'un foyer violent et souhaite faire adopter son enfant, car pas encore prête à être mère. Enfin, Naïma, dont j'ai l'impression que l'histoire a disparu dans une faille spatio-temporelle, car je n'ai aucune souvenir d'elle. Une forme chorale, donc, qui semble être la seule originalité dans le cinéma des frères Dardenne pour leur dernier cru.
Pauvreté, alcool, drogue, violence familiale, racisme même. Le bilan sociologique est clair, réaliste certes. Nul doute que les classes populaires sont davantage touchées par les grossesses adolescentes. Mais tout ça reste basique, à l'état de constat. Au bout de 13 films, on peut enfin dire que les Dardenne ont sombré dans le misérabilisme basique, l'érotisation du prolo pour faire pleurer dans les chaumières. Apparaît aussi cette désagréable impression de voir deux vieux réalisateurs qui se placent en preux chevalier pour redresser les tors du monde entier et ici des pauvres mères adolescentes.
Le film m'a surtout laissé sur le tapis par le schématisme du scénario, ou plutôt des scénarios. Chaque personnage empreint le même parcours. Situation initiale compliquée, divers obstacles, moment de crise et opportunité d'un nouveau départ. Tout est bien qui finit bien pour tout le monde. On pousse même la chansonnette pour la dernière scène. Le prix du scénario à Cannes est sans doute ma plus grande incompréhension autour de ce film.
Trop obsédés à créer des portraits sociologiques lourdingues, les réalisateurs surexplicitent tout par le dialogue, que ce soit le é des personnages, les envies, les sentiments. On se retrouve alors à suivre des scènes pénibles aux dialogues embarrassant et qui fatalement entraîne les acteurs dans le mauvais jeu.
À la lourdeur de l'écriture, s'ajoute la lourdeur de la mise en scène. Une mise en scène qui ne se renouvelle pas et qui se contente de filmer frontalement un scénario déjà frontal. Il en ressort tout de même quelques parcours intéressants comme celui de Perla qui se fait larguer par son petit con de copain immature ou celui de Jessica qui semble vouloir démarrer sa maternité en trouvant le lien avec sa mère. Un bien joli parallèle.