Parce que vous ne valez rien

Etant donné le succès sans précédent rencontré sur Netflix par le documentaire consacré à l’affaire Banier-Bettencourt, il était évident que le cinéma n’allait pas tarder à s’emparer de cette histoire rocambolesque qui, il faut bien l’avouer, tient du pain béni pour n’importe quel scénariste. D’autant plus dans le contexte actuel, alors que le ressentiment envers les héritiers et autres moguls s’accaparant sans vergogne la plus grosse part du gâteau ne cesse de prendre de l’ampleur.


Pour être honnête, on ne sait pas très bien sur quelle approche se situe Thierry Klifa pour son film : visiblement pas sur le biopic (les personnages sont nommés différemment, le scénario prend des libertés avec l’histoire vraie) mais pas sur la pure fiction non plus (les interventions des acteurs face caméra singeant le principe du documentaire, le déroulement des faits globalement très proche de la réalité). Au final, cet aspect hybride n’est guère important, le réalisateur s’attachant avant tout à dépeindre un monde de faux-semblants peuplé d’être déconnectés de la réalité, où seul l’argent importe, où les fortunes outrancières se bâtissent sur l’exploitation des autres et sur des héritages embarrassants qu’on s’empresse de cacher sous le tapis, où l’on est incapable d’aimer alors qu’on a tout (ou peut-être justement parce qu’on a tout…).


Tout cela n’est ni nouveau ni révolutionnaire dans son traitement, mais exécuté avec suffisamment de panache pour qu’on ne décroche pas, bien aidé par une brochette d’acteurs très investis dans leur rôle. Si la grande Isabelle Hupert est, comme à son habitude, totalement crédible dans le rôle de cette femme complexe, à la fois effrayante de sociopathie et touchante dans ce qu’elle laisse deviner de souf intérieure, Laurent Lafitte prend visiblement un plaisir jubilatoire à incarner une ordure arriviste, manipulatrice et bigger than life, dans une performance toujours sur le fil de la bouffonnerie grotesque mais indéniablement jouissive.

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Little John

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