Deniz Gamze Ergüven nous livre avec Mustang un produit calibré pour le public occidental, déguisé en drame social poignant sur l’oppression des femmes en Turquie. Sous couvert d’un récit initiatique de cinq sœurs confrontées au carcan patriarcal, le film déroule un récit simpliste, caricatural et idéologiquement orienté, où la complexité culturelle et historique est sacrifiée sur l’autel du militantisme féministe et du fantasme occidental d’un Orient arriéré à libérer.
Une réalisatrice totalement illégitime pour parler du sujet
Avant même d’aborder le film, il faut s’attarder sur l’origine de sa réalisatrice, car son positionnement trahit l’ensemble de la démarche du film. Deniz Gamze Ergüven, fille de diplomate turc, a grandi en et aux États-Unis, dans les sphères culturelles et politiques internationales. Elle n’a jamais vécu dans la Turquie rurale qu’elle prétend décrire et a été formée dans les écoles françaises, loin des réalités qu’elle caricature ici.
Dès lors, Mustang n’est pas une œuvre de témoignage, mais un projet de propagande occidentalisée, conçu pour répondre aux attentes du spectateur européen moyen. Ce n’est pas un hasard si le film a été co-produit par la , distribué avec un marketing quasiment inexistant en Turquie, et immédiatement encensé par les festivals internationaux. C’est un film fait par une Française pour des Français, avec une vision infantilisante et condescendante de la Turquie, où les populations locales sont réduites à des archétypes barbares et répressifs.
Une Turquie fantasmée pour plaire aux bobos cinéphiles
Dès les premières scènes, Mustang affiche son manichéisme puéril :
- Les filles sont solaires, rieuses, libres et modernes.
- Les adultes sont des figures sombres, autoritaires, religieuses et oppressantes.
Il n’y a aucune subtilité, aucune complexité sociologique, aucune nuance historique. La Turquie est décrite comme un enfer conservateur, où les jeunes filles sont enfermées, bridées et vendues de force en mariage comme si elles vivaient sous un régime taliban.
Or, la réalité est bien différente :
La Turquie, même sous Erdoğan, reste un pays bien plus moderne et contrasté que le portrait misérabiliste du film.
Dans les années 2010, les jeunes filles turques n’étaient pas cloîtrées comme dans un drame du XVIIIe siècle, mais bénéficiaient d’un accès aux études, à Internet et à la culture pop mondiale.
Les mariages forcés existent encore dans certaines zones rurales, comme dans beaucoup de pays, mais ils ne sont pas la norme absolue et encore moins le destin inévitable de toutes les femmes.
Le film ne cherche jamais à comprendre la société turque contemporaine, il veut simplement fabriquer une version fantasmée du patriarcat oriental, pour que les spectateurs européens puissent se féliciter d’être du "bon côté de l’histoire".
Une sexualisation absurde et incohérente des personnages
Le plus grotesque dans ce film, c’est la manière dont il injecte de la sexualisation là où elle n’a pas lieu d’être.
D’un côté, Mustang prétend dénoncer une société répressive qui bride l’expression des femmes.
De l’autre, les adolescentes s’expriment avec une vulgarité et une crudité totalement incompatibles avec leur environnement culturel.
Le film trahit ici son imposture totale : il plaque sur ces jeunes filles une mentalité de collégiennes parisiennes, dans un décor censé être traditionnel.
C’est un problème fondamental de crédibilité : ces jeunes filles sont censées être formatées par une éducation stricte, mais elles s’expriment et se comportent comme des adolescentes occidentales ultra-sexualisées.
Cela révèle l’objectif réel du film : il ne s’agit pas de dénoncer un système avec justesse, mais d’imposer un modèle culturel unique, où la seule forme d’émancipation est l’occidentalisation totale et la libération sexuelle à l’américaine.
Un féminisme de pacotille et un discours politique grossier
Le film ne fonctionne que sur une seule idée fixe :
- La femme turque n’est libre que lorsqu’elle adopte les codes de l’Occident.
- Tout ce qui est traditionnel est oppressif.
- Tout ce qui est moderne et libéral est une victoire absolue.
Le discours sous-jacent est d’une brutalité idéologique effarante :
- Il n’existe pas de voie intermédiaire entre soumission absolue et occidentalisation complète.
- L’identité turque doit être effacée pour permettre l’émancipation.
- L’Islam est un frein au progrès, mais il ne faut pas le dire trop ouvertement pour ne pas froisser les festivals.
La réalisatrice va même plus loin en s’attaquant directement au gouvernement turc, notamment dans ses interviews, où elle assimile l’AKP et Erdoğan à une régression médiévale.
Qu’on critique Erdoğan, soit. Mais en faire le symbole du retour au Moyen Âge, alors que la société turque n’a jamais cessé d’évoluer, c’est du pur mensonge propagandiste.
D’ailleurs, le film évite soigneusement de parler de la réalité économique, politique et géopolitique du pays. Car ce qui intéresse la réalisatrice, ce n’est pas la vérité, c’est la diffusion d’un message simpliste, destiné à rassurer les spectateurs occidentaux dans leurs préjugés.
Une escroquerie culturelle, servie par des critiques complaisantes
Évidemment, Mustang a été immédiatement encensé par les critiques, qui n’ont même pas cherché à questionner la vision du film.
Tous ont répété les mêmes phrases creuses :
"Un film nécessaire."
"Une claque féministe."
"Un brûlot contre l’oppression patriarcale."
Pas un seul mot sur l’occidentalisation forcée du discours.
Pas une seule interrogation sur la légitimité de la réalisatrice à parler du sujet.
Pas un seul doute sur la représentation grotesquement caricaturale de la Turquie.
Conclusion : un film malhonnête et idéologiquement douteux
Mustang n’est pas un film sur la Turquie, ni sur les femmes turques.
C’est un film français déguisé en drame oriental, conçu pour caresser le spectateur occidental dans le sens du poil.
Sous couvert de "féminisme", il impose une seule vision du monde possible : celle d’une modernité occidentale absolue, contre un patriarcat musulman fantasmé et caricaturé.
Ce film est une escroquerie culturelle, et son succès critique prouve une chose : ce n’est pas la qualité cinématographique qui compte, mais l’idéologie qu’il véhicule.