Sur les planches du Bolchoï, lorsque la jambe de Dominika se brise dans un ramdam orchestral, le réalisateur introduit l’idée d’une beauté à revers, impérieuse, brutale et Red Sparrow s’ouvre avec ardeur. Elle succombera aux sirènes d’un oncle perfide. La demoiselle devient un “moineau rouge”, un super-agent au service d’une intelligence véreuse. Entre les mains des services secrets, Dominika, entrainée par Charlotte Rampling, deviendra une arme de séduction massive et offre en filigrane un joli discours sur la manipulation. Il s'engage alors une filature psychologique à contre-courant des films de Paul Greengrass (Jason Bourne), et les choix de mise en scène donnent une identité notable au thriller.
Un film d’espion au féminin, une tentative psychologique, violente et sexuée; discutable par ailleurs, il reste une proposition de cinéma honorablement incarnée par la flopée d’acteurs. Après Mother! (Darren Aronofsky), Jennifer Lawrence continue de prendre des risques, Matthias Schoenaerts se frotte à un genre nouveau, et Jeremy Irons compose avec charisme. Sans oublier Charlotte Rampling impeccable en matrone glaciale et un Joel Edgerton qui fait le boulot. Nul n’y brille mais le film a du tempérament.
Violence abrupte et quasi gratuite...
Mais si Red Sparrow vacille c’est ailleurs. Une nouvelle fois, Hollywood nous livre une “femme forte” qui en définitive se révèle être la marionnette sexy d’une gérontocratie soviétique. Le twist amoureux ouvre une lucarne sur Roméo & Juliette. L’intelligence dans la séduction donnera du corps au personnage de Dominika mais la violence abrupte et quasi gratuite des scènes étouffera l’histoire. Le sauna, la classe, la douche, le viol et la torture finale…
Dans la veine d’un récent Atomic Blonde avec Charlize Theron, Red Sparrow tente une réécriture mais repose son originalité sur une incarnation féminine. Plus étonnant encore, il flotte la vision d’une femme contrainte à la nudité pour servir les intérêts des hautes sphères dans l’espoir de se libérer. Curieux … Aussi périlleux soit-il pour Jennifer Lawrence, le cheminement de Dominika laissera perplexe. C’est tout le paradoxe de Red Sparrow, une vision maladroite dans un film d’espionnage pourtant brut et à la mise en scène exigeante.
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