Depuis The French Dispatch et Asteroid City, Wes Anderson n'est plus l'enfant chéri de la critique. Alors même qu'il ne fait finalement que ce que l'on attend de lui.
Et si Asteroid City représentait en effet un sacré coup de moins bien, tellement la réaction à l'insuccès transpirait, la bouderie subite réservée à The French Dispatch, alors même qu'il constitue d'un des plus beaux opus de son grand ordonnateur, fait toujours plisser d'incompréhension, les yeux du masqué aujourd'hui.
The Phenician Scheme, lui aussi rentré bredouille de Cannes, constituera certainement pour beaucoup une nouvelle déception signée Wes Anderson, alors même que celui-ci retrouve de sacrées couleurs et une grande partie de ses moyens.
Allez comprendre.
En effet, Wes ressort la tête de l'eau et de la malheureuse dévitalisation de son cinéma vue en 2023 et livre à nouveau une fantaisie dont il le secret.
On pourrait, comme à chaque œuvre, louer la précision métronomique de sa mise en scène, son amour immodéré de la symétrie signifiante, ou encore la composition millimétrée de chaque photogramme, à l'image de son générique, d'une beauté de sainte mosaïque.
J'aimerai quant à moi célébrer Wes dans un certain retour aux sources.
Celui de son sens de l'absurde qui ne tourne plus à vide, comme dans Asteroid City. Oui, je radote.
Celui de sa petite folie qui donne une curieuse impression d'évasion de ses décors en vase clos.
Celui de son amour des rencontres de personnages décalés, voire qui n'auraient rien à faire dans un film dit « normal », comme le Bjorn qu'incarne avec retenue un Michael Cera des grands jours.
Mais surtout celui qui parle de la famille et de ses failles. Qui fait que même si Korda est dépeint comme une enflure égoïste finie, on ne peut qu'éprouver une certaine forme de tendresse à son égard dans son évolution, contenue dans les rapports avec une fille ainée qui apprend à l'aimer malgré elle.
Ses expériences de mort imminente, mises en avant de manière surréaliste via les images d'Epinal classiques, ses tics de langage et phrases fétiches, son amour de la grenade : on ne peut rester indifférent devant un tel personnage...
Mais qui ne serait rien sans sa partenaire de jeu, aussi attachante que déterminée. Leurs retrouvailles sont touchantes, leur périple méditerranéen commun, sorti d'un album de Tintin, s'impose comme un véritable délice. Tout comme le duo formé par Benicio et Mia.
Wes apparaît comme apaisé après ses déconvenues. Et s'il n'arrive pas à égaler ses magnum opus, il réussit néanmoins à réinjecter sentiments et couleurs à son art redevenu vivant et pétillant sous l'oeil de sa caméra.
Et Phénicie... Aussi.
Behind_the_Mask, qui prendra bien une autre grenade.