Nine Puzzles
7.3
Nine Puzzles

Drama Disney+ (2025)

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La Vérité c’est l’Enfer

Whaou ! Vous entrez dans un univers qui rend hommage aux thrillers. Voici une série policière qui joue avec les codes du genre et explore les zones grises entre le bien et le mal. À l’instar de notre profileuse qui, elle aussi, se joue de nous.


Un soir, une adolescente, Yoon Ena, rentre chez elle et découvre son oncle gisant dans une mare de sang. Seule témoin, elle est interrogée par l’inspecteur Kim Han Saem, qui la suspecte fortement. Dix ans plus tard, Yoon Ena est devenue profileuse et cherche toujours la vérité. Elle conserve précieusement une pièce de puzzle trouvée sur la scène du crime.

Mais un nouveau meurtre est commis, et Yoon Ena est à nouveau impliquée, d’autant qu’elle reçoit une seconde pièce de puzzle, envoyée par courrier express. Elle e alors Han Saem et finit par le convaincre de collaborer avec elle pour identifier le tueur.


Yoon Ena est une profileuse brillante et froide. Directe, vive, rapide, caustique, sarcastique, elle se moque de la bienséance et suit uniquement sa propre logique. Amatrice de sensations fortes, elle conduit vite et flirte constamment avec la provocation. Sa tenue stricte, chemise et cravate rappelle clairement Mercredi Addams : icône de la marginalité, du cynisme, du détachement émotionnel. Ce style vestimentaire incarne une maîtrise de soi et un rejet des codes sociaux.


Physiquement, Kim Da-mi colle parfaitement à ce rôle. Sa bouille enfantine confère à son personnage une forme d’innocence insolente, qui s’accorde à merveille avec le caractère renfrogné, méfiant mais fin observateur de Han Saem. Son charme viril et sauvage est porté avec justesse par l’excellent Son Suk Ku.


Leur duo justifie à lui seul le visionnage de la série. Mais ce serait oublier la richesse de l’écriture, les nombreuses références cinématographiques et même sociétales disséminées tout au long des épisodes.


À l’instar de Memento de Christopher Nolan, Yoon Ena souffre d’une amnésie partielle depuis le meurtre de son oncle. Si le procédé est classique, ici il ne s’agit pas d’une perte totale de mémoire, mais d’un flou volontaire qui installe une atmosphère de suspicion dès le départ entre nos deux protagonistes. Le motif du tueur laissant des pièces de puzzle évoque la mise en scène rituelle des crimes dans Se7en (1995) ou Zodiac (2007). Chaque scène devient un message codé, un indice dans un jeu d’esprit tordu.


L’esthétique visuelle suit cette logique : jeux d’ombres et de lumière, plans filants qui nous ancrent dans le réel, image granuleuse, gros plans, rythme lent mais nerveux... un style qui n’est pas sans rappeler Fincher ou Nolan. Dès le générique, sublime, une couleur domine : le rouge. Yoon Ena l’arbore partout, casque audio, voiture, valise, veste, ordinateur, téléphone, manette de console, porte-clef, accessoires de bureaux… jusqu’aux moindres éléments du décor tout au long de la série.


Yoon Ena semble enfermée dans une partie de Cluedo grandeur nature, comme si elle était la première victime oubliée. Chaque scène de crime est une énigme fermée, avec une victime, un lieu, une arme. Tout évoque un jeu où le tueur place ses pièces pour qu'on les interprète. Cela suggère un criminel qui théâtralise ses actes, comme dans Zodiac, dans une volonté de communication cryptée, où objets, symboles et victimes sont intimement liés.


Contrairement à d’autres thrillers coréens où l’on suit le tueur dans l’action, Nine Puzzles choisit d’effacer l’instant du crime. On ne voit ni la violence, ni le tueur à l’œuvre. Tout se joue dans l’introspection, dans la tête de Yoon Ena. Lorsqu’elle reconstitue les meurtres, c’est comme une pièce de théâtre mentale, à la manière des courts-métrages introduits par Hitchcock dans son émission (oui je sais c’est très vieux !) « Hitchcock Presents ».


La série nous invite à devenir enquêteur nous aussi, à la manière de Sherlock Holmes et autres grands noms de la littérature policière. La série rend hommage à ces figures à travers Han Saem, observateur méthodique. Je me suis même demandée si le fait de ne pas voir les meurtres signifiait que la mémoire de Yoon Ena nous manquait à nous également. A l’instar de Gone Girl, où la perception de la vérité est floue, ou même Fight Club, où le spectateur est volontairement privé d’éléments clés jusqu’à la révélation finale. C’est un thriller de l’absence, de la mémoire. Yoon Ena le dit d’ailleurs : « C’est dans le doute que l’on trouve la réponse. »


Elle évoque aussi l’enfer. Cela m’a immédiatement fait penser à La Divine Comédie de Dante, et ses neuf cercles. Yoon Ena y serait Béatrice, la guide, et Han Saem, Virgile, la raison. Chez Dante, l’Enfer est le lieu où l’on regarde la vérité en face… Mais je sens que je m’égare !


J’ai donc adoré ce thriller. Kim Da-mi est toujours épatante. Je l’avais déjà aimée dans Our Beloved Summer. Elle est discrète et je l’apprécie pour ses choix de rôles souvent exigeants et de qualité. Son Suk Ku est un acteur que j’adore également. Il a ce côté sauvage et libre qui m’a séduite (dès que je l’ai découvert dans DP), et son jeu ne me déçoit jamais.


Le scénario est très bien construit, riche en détails. Rien n’est laissé au hasard. La réalisation est dynamique, précise, belle. Les images saturées, texturées, m’ont littéralement envoûtée. Je n’ai pas mis 10 simplement à cause d’un tout petit bémol sur la fin. Une saison 2 serait envisagée selon l’audience.

9
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il y a 4 jours

Critique lue 70 fois

AliceJeanis

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